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L'Empire gréco-romain (2005)
De Paul Veyne chez SeuilLa séparation des chaires de grec et de latin au sein de l'Université française perpétue le mythe d'une distinction, voire d'une opposition, entre « la Grèce » et « Rome ».Pourtant, l'Empire dit « romain » fut en réalité gréco-romain à plus d'un titre. Et d'abord par la langue. Certes, la langue véhiculaire qu'on pratiquait dans sa moitié occidentale était le latin, mais c'était le grec autour de la Méditerranée orientale et au Proche-Orient. Ensuite, la culture matérielle et morale de Rome est issue d'un processus d'assimilation de cette civilisation hellénique qui reliait l'Afghanistan au Maroc. Enfin, l'Empire était gréco-romain en un troisième sens : la culture y était hellénique et le pouvoir romain ; c'est d'ailleurs pourquoi les Romains hellénisés ont pu continuer à se croire tout aussi romains qu'ils l'avaient toujours été.Le présent volume entend suggérer, à coups d'aperçus partiels et de questions transversales, une vision d'ensemble qui ne soit pas trop incomplète de cette première « mondialisation » qui constitue les assises de l'Europe actuelle.PAUL VEYNE, est né en 1930 à Aix en Provence. Élève de l'École normale supérieure, puis de l'École française de Rome, il a été nommé Professeur d'histoire romaine au Collège de France en 1975. Il a publié notamment, au Seuil, Comment on écrit l'histoire, Le Pain et le Cirque, Les Grecs ont-ils cru à leurs mythes?, et L'Élégie érotique romaine.
Collection : Des TravauxTags : essai, histoire, mondialisation, empire, morale, séparation, romain, civilisation, Influence hellénistique, monde romain, empire romain, politique, antiquité, rome antique, mythologie, philosophie, france, rome, grec, grèce, essai, histoire, magie, culture, occident, mythes, civilisation, civilisation romaine, savoirs, monde grec, théologie, antiquité, histoire antique, rome antique, latin, Rome (Empire), littérature latine, rome, grèce, littérature grecque.
Citations de L'Empire gréco-romain (10)
Rome était l'empire du backchich et de l'extorsion ou squeeze à tous les niveaux.
Ce que n'offrait pas le paganisme, c'était l'amour d'un Dieu aimant. On n'avait pas de rapports sentimentaux avec ces puissants étrangers qui vivaient d'abord pour eux-mêmes. Leurs fidèles ne dialoguent pas en leur coeur avec ces grands personnages, n'ont pas avec eux la relation passionnée et mutuelle des Psaumes. Le paganisme ignore toute relation interne des consciences entre les dieux et les hommes. Le christianisme aura été une religion plus aimante, plus passionnante, il aura eu l'espèce de succès d'un best-seller qui vous prend aux tripes par sa chaleur éthique, par son Dieu redoutable mais aimant, avec lequel on peut converser intimement.
(...) la disparition de l'Empire romain en Occident n'a pas été une "chute" à la fin d'une "décadence" politique, militaire, administrative, économique, démographique ou morale. (...) l'Empire du IVème siècle, reconstruit par Dioclétien et Constantin, était aussi solide que jamais. La chute de sa moitié occidentale a été un accident imprévisible, due à une concaténation fatale de causes multiples ; elle n'a pas eu une grande cause instructive, ne donne pas une grande leçon ; ce fut un processus accidentel, fait de causes innombrables. On pourrait incriminer le manque d'argent et de troupes (et encore n'est-ce pas sûr), la rivalité des deux moitiés de l'Empire, la quasi-simultanéité des invasions sur le Danube et sur le Rhin, la xénophobie antigermanique, le souci de préserver avant tout le trône impérial et tant d'autres raisons (dont l'existence de la Méditerrannée), que cet écroulement d'une grande construction est un problème historique faussement grand. (...) la chute de l'Empire d'Occident fut un accident inattendu où un grand nombre de petites causes et de petites conditions ont fait boule de neige.
L'idée moderne et, somme toute, démocratique de propagande suppose qu'il faut politiser les populations, que seule une action positive du pouvoir met et maintient les peuples dans le sens souhaité, et que leur obéissance est une cration continuée. C'est là une vue trop optimiste des choses ; la soumission à l'ordre établi, l'obéissance, est la chose du monde la plus répandue, sinon l'histoire universelle serait très différente de ce qu'elle est. C'est pourquoi, pendant des millénaires, la bonne recette de gouvernement a été non de politiser les populations à coups de propagande, mais de les laisser vivre dans l'incurie ; on se gardait d'exciter des esprits prompts à l'insubordination. Car quelle catastrophe serait-ce si, aux guerres entre usurpateurs du trône impérial, aux menaces barbares sur le Danube et l'Euphrate et aux progrès de l'athéisme chrétien, venait s'ajouter l'excitation incontrôlable d'une plèbe tirée de son sommeil !
(...) ce que les siècles à venir devaient retenir est que les Wisigoths firent comme tous les Barbares qui envahirent les provinces spetentrionales de l'Empire : ils conservèrent les cadres de l'Etat romain et ils adoptèrent le latin, langue des Evangiles chrétiens ; ils adoptèrent aussi le principe chrétien de rendre à César ce qui est à César et de ne pas confondre Eglise et Etat. C'est la grande différence avec ce qui s'est passé au sud de la Méditerrannée, où les Arabes qui soumirent les provinces méridionales de l'Empire ont effacé les institutions romaines et la langue latine, et ont identifié loi humaine et loi divine. Et c'est ainsi que, succédant à l'Empire romain défunt, a commencé à se former quelqe chose d'original qui devait s'appeler une jour l'Europe Occidentale.
Un rationalisme étroit nous fait postuler que tout évènement s'explique par ce qui le précède, par le passé, le contexte, l'état de la société. On oublie que la première croisade, la révolution de 1789, l'impérialisme napoléonnien ou l'impressionnisme sont dus à une foule ou à un groupe qui s'est enflammé pour un projet, pour quelque entreprise de gloire et de conquête, pour des possibilité artistiques à exploiter, ce qui allait déplacer l'avenir et ne découlait pas du passé.
(...) dans la production artistique du passé et du présent, beaucoup d'amateurs (...) recherchent moins la qualité formelle, la beauté, que l'inventivité ; ils sont attirés par l'inépuisable richesse des formes possibles. C'est une sorte de sens de l'infini, analogue à la fascination qu'éprouvent les naturalistes devant le nombre illimité d'espèces vivantes qu'ils ne se lassent pas de recenser ; devant la capacité de la nature à inventer des formes. On est séduit de nos jours par la diversité des oeuvres du passé, chefs d'oeuvre ou non, et on s'intéresse moins à des oeuvres singulières qu'à des espèces, portraits du Fayoum, icônes, portraits palmyréniens. Il en est de même de l'art contemporain, qui, imbu de ce sentiment de l'infinité des possibles, crée son propre champ de recherche, et explore sa nature et ses limites.
Grecs et Juifs avaient en commun de se considérer comme un peuple différent de tous les autres, un peuple qui avait une vocation supérieure ; les Grecs possédaient la vraie civilisation et les Juifs, depuis le Deutero-Isaïe, le dieu le plus grand, le seul vrai, devant lequel toutes les nations finiraient par venir s'incliner. Aussi les uns et les autres ont-ils vécu dans la conscience de leur identité et dans le ressentiment envers leurs maîtres romains, à la différence des autres nations de l'Empire.Dès lors, nous tenons la clé ultime de toute l'histoire que nous venons de raconter. (...) il y a (...) des civilisations qui ont le sentiment d'être porteurs d'un idéal qui vaut pour tous les hommes. (...) Auront de même, un jour, ce complexe de supériorité l'Islam, qui voudra faire régner partout sont dieu, ou encore les Américains et les Français, qui se considéreront comme porteur des même valeurs universelles.
Dans tous les coins de son empire, Rome fournissait et assurait aux puissants et possédants de chaque lieu le plus succulent des hydrocarbures, leur pouvoir et leur richesse. Rome commandait de loin, ses gouverneurs n'étaient entourés que de quelques dizaines de subordonnés pour toute une province et ne s'occupaient guère que de défendre la frontière, de faire lever l'impôt par les notables indigènes et de rendre la justice criminelle ; les cités ou plutôt leurs notables conservaient le self-government de leur propres affaires. Toutefois, Rome n'aurait pas toléré une révolution populaire ni des attaques au droit de propriété. C'est ainsi que l'Empire romain a duré et non par de bonnes lois, encore moins par de bonnes moeurs ou parce que les Romains auraient eu un sens de l'organisation plus aigu que d'autres.
(...) le rayonnement des grandes cultures n'est pas toujours un sous-produit de la puissance politique et militaire ; on a vu au cours des siècles une vraie supériorité s'imposer d'elle-même ; il existe dans l'histoire un vecteur de progrès : l'humanité tend sans cesse à devenir plus "moderne" et c'est déjà une bonne chose, dont il faut nous contenter ; mais elle ne tend guère à devenir plus vertueuese et ne saurait devenir heureuse et satisfaite (à cause de l'infinitude du besoin).
Critiques de L'Empire gréco-romain : avis de lecteurs (16)
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Critique de L'Empire gréco-romain par BruC (Babelio)Cet essai ambitieux a été un récent best-seller surprise. Je serais curieux de connaître l'avis de quelques uns de ces nombreux lecteurs. le mien est plus que mitigé. Autant j'avais été enthousiasmé p...
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Critique de L'Empire gréco-romain par Henri-l-oiseleur (Babelio)Chaque essai de ce volume passionnant renouvelle les perspectives, débroussaille les sujets épineux, ou dévoile sous la patine la nouveauté merveilleuse d'un fait antique. C'est la magie du regard de ...
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Critique de L'Empire gréco-romain par livius (Babelio)Une véritable somme et une réflexion sur la nature gréco-romaine de cet immense empire...
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Critique de L'Empire gréco-romain par eric (Amazon)ce livre n a de sens que si on connait deja au moins un peu l antiquité romaine. comme il traite aussi de Palmyre, il est conseillé de lire le petit bouquin de Paul Veyne sur cette ville, ressorti recemment en ...
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Critique de L'Empire gréco-romain par Richard Vieille (Amazon)Il est toujours intéressant de revisiter les racines de l'occident en multipliant les regards dans un livre solidement documenté mais toujours passionnant
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Critique de L'Empire gréco-romain par mahikeul (Amazon)Paul Veyne est décidément un historien surprenant. Cet ouvrage nous propose la publication de 13 articles extrêmement hétéroclites, sous un titre polémique.En effet, peut-on parler d'empire gréco-romain, ou n'e...
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Critique de L'Empire gréco-romain par Guy Poizat (Amazon)Pour avoir lu plusieurs des classiques sur le sujet, je pense que l'on peut considérer cet ouvrage d'un millier de pages comme une véritable somme, agréable à lire de surcroît. Notes de bas de page abondantes q...
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Critique de L'Empire gréco-romain par ECOLE40 (Amazon)Un ouvrage magnifique,magistral qui devrait figurer dans toutes les bonnes bibliothèques.A recommander a tous les amoureux de l'histoire.J'attends de commander le prochain ouvrage de PAUL VEYNES .
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Critique de L'Empire gréco-romain par nekki (Amazon)Le livre de Paul Veyne est passionnant et se lit comme un roman. Passionnant par les vues neuves et audacieuses de l'historien, qui relie constamment le passé au présent en établissant des relations entre l'emp...
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Critique de L'Empire gréco-romain par Chabiague (Amazon)Le must du must concernant l'histoire romaine. Néanmoins, il faut du temps pour l'éplucher si je puis dire ! Très riche, complet et surtout une présentation multiple de l'Empire romain.
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Critique de L'Empire gréco-romain par Gabelette (Amazon)Lorsque j'ai tenté d'obtenir des évaluations concernant ce produit, j'ai noté un commentaire beaucoup trop obscur pour pouvoir m'en faire une idée correcte et un autre tellement objectif et narratif que l'on cr...
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Critique de L'Empire gréco-romain par phobos (Amazon)En lisant certains commentaires je me suis dit que nous n'avons pas lu le même livre... Car il ne s'agit pas d'un livre, mais d'un RECUEIL d'articles publiée içi ou là dans diverses revues scientifiques et remi...
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Critique de L'Empire gréco-romain par Louis Gastebois (Amazon)Paul Veyne a réussi un ouvrage fascinant sur l'empire romain qui rappelle "L'histoire de la chute et du déclin de l'empire romain", de Edward Gibbon.En effet, dans une très belle langue, il nous dresse un portr...
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Critique de L'Empire gréco-romain par Damien Coullon (Amazon)Paul Veyne est professeur d'histoire romaine au Collège de France et ça se voit. En bien comme en moins bien : une érudition vraiment hors du commun, mais généralement relativement accessible, sauf parfois dans...
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Critique de L'Empire gréco-romain par Koubilai_khan (Amazon)Paul Veyne essaie de nous faire envisager les différents aspects d'un monde romain à diverses périodes (haut et bas empire) à travers les yeux d'un Romain ou d'un Gréco-Romain. Il utilise souvent pour cela des ...
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Critique de L'Empire gréco-romain par Marot (Amazon)avez vous un budget pour remettre aux élèves qui marquent de de la passion sur leur racine ce livre simple précis concisPour nous rendre plus inculte qu'avant de savoir que ce monde existait nous qui croyons en...
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Ils parlent de L'Empire gréco-romain
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